Eh oui. Evacuer. Se vider de. Passer d’une émotion à l’autre. Quand on a eu une crise de fou rire nerveuse, on écrase des larmes sur ses joues. On est un peu désorienté, parce qu’il n’y a pas cinq minutes, on avait l’air gai, une répartie de folie, prêt à dégainer devinettes et calembours. Puis on s’est mis à sangloter, mais c’était pas voulu, c’était si émouvant, justement, de rire à gorge déployée qu’on s’est rappelé d’un seul coup qu’on était non-fumeur: une fatalité, une désolation. Après avoir épuisé dix-sept mouchoirs jetables, on crie sur les murs, parce qu’on leur en veut de n’être pas utiles, et pour leur lâcheté de témoins! On se ravise: ne plus fumer, c’était le but ,et le but est atteint. Que demande le peuple?
Une écoute. Moi j’ai visité souvent mon père (ex gros fumeur décédé à cause d’un coeur rongé), lui faisant part de mes doutes, parce que les « impérieuses » étaient encore présentes, qu’elles me narguaient, au moment-même où je lisais dans des ouvrages spécialisés qu’elles n’étaient censées durer que quelques minutes!!! Les miennes s’installaient comme chez elles, sans garantie qu’elles partent un jour! J’appelais Tabac Info Service, les propos étaient plus nuancés. On m’entendait gémir, renifler, puis une sorte de mauvaise synchro de l' »Exorsiste version longue« : un cri si puissant qu’il aurait percé un tympan!!!
*Projeter son mal en voiture:
je ne connais pas de lieu dans ce monde (à part quelques îles désertes, juste de nom) où s’exprimer sans effrayer quelqu’un, sans être dénoncé auprès des autorités pour tapage; je ne connais que les piscines et les autos pour « cracher » le mal. Vous roulez, vous chantez sur un morceau au pif, c’est déjà une façon de se vider du vice. Alors insulter un tableau de bord me semble une façon habile de déjouer l’entrée d’une « impérieuse » en grandes pompes. On anticipe, on la tance, on la toise, on parle plus fort qu’elle. Elle n’aura pas le dernier mot!
*Nager en pleurant:
je vous recommande la brasse coulée, et les insultes salées à deux mètres de profondeur. Je l’assure ici: PERSONNE ne vous entend. Second avantage, de taille: vous êtes trempée de la tête aux pieds, en sortant de l’eau. Vos yeux sont fatalement rougis par le chlore, votre nez est censé avoir adopté la même couleur. Total? Vous ne seriez pas en maillot de bain, on ne vous aurait pas vu enchaîner des longueurs sans fin….on aurait juré que vous avez pleuré! Eh bien non, personne ne peut le déceler, vous avez tout envoyé valdinguer, et les problèmes du quotidien annexes, tiens: les amours, la famille, le patron, les administrations, tout y passe au fond d’un bocal olympique! 🙂
Dieu merci, c’est MA certitude: si vous lisez ce billet et que vous sentez venir l’envie, la vraie, je vous promets, encore et encore, qu’un jour, une nuit, elle abdique. Et ne revient JAMAIS!
Un avis sur « Pleurer, rire, crier, les premiers jours »